Le concept de Memento Mori qui signifie littéralement « Souviens-toi que tu vas mourir » en latin est une ancienne pratique philosophique et spirituelle chère aux stoïciens. Depuis des siècles, elle a traversé les âges et a servi à rappeler aux individus la nature éphémère de la vie. Si cette idée peut sembler sombre à première vue, elle est en réalité profondément libératrice et peut transformer la manière dont nous vivons au quotidien. Dans notre monde moderne, dominé par l’accélération des rythmes de vie, l’obsession du succès et la distraction constante, le Memento Mori peut être un antidote puissant contre l’anxiété, la procrastination, et la superficialité.
Cet article explore comment ce concept antique peut s’intégrer dans nos vies contemporaines et nous donne des exemples pratiques pour l’appliquer au quotidien. En prenant conscience de notre mortalité, nous apprenons à valoriser chaque moment, mais nous nous libérons aussi de beaucoup de peurs et d’inquiétudes inutiles.
1. Qu’est-ce que le Memento Mori ?
Le Memento Mori trouve ses racines dans la philosophie stoïcienne, bien que l’idée soit présente dans de nombreuses traditions religieuses et spirituelles. Pour les stoïciens, notamment Marc Aurèle et Sénèque, la conscience de la mort était une manière de vivre pleinement et avec intention. La mort n’était pas vue comme une fin tragique, mais plutôt comme une motivation pour vivre de façon vertueuse et significative.
L’empereur Marc Aurèle écrivait dans ses Pensées pour moi-même : « Vous pourriez quitter la vie à tout moment : que cela détermine ce que vous faites, dites, et pensez. » En d’autres termes, en sachant que notre temps est limité, nous sommes plus enclins à faire des choix qui importent vraiment et à vivre selon nos valeurs.
2. Pourquoi le Memento Mori est-il plus pertinent que jamais ?
Dans notre société moderne, nous sommes souvent déconnectés de la réalité de la mort. La technologie et la médecine nous ont donné l’illusion d’une certaine invincibilité. Par ailleurs, la culture actuelle exhorte à une forme de fuite en avant : nous sommes constamment occupés, accaparés par des projets, des objectifs à atteindre, ou des distractions (réseaux sociaux, divertissements, etc.). Pourtant, cette frénésie ne fait que masquer une peur sous-jacente de l’incertitude, de la perte et de la mort.
Le Memento Mori nous invite à affronter cette réalité avec courage et à l’utiliser comme un levier pour mieux vivre. Prendre conscience de notre mortalité nous pousse à être plus authentiques, à apprécier le présent et à consacrer notre énergie aux choses qui comptent vraiment pour nous.
3. Comment appliquer le Memento Mori au quotidien ?
Voici quelques exemples concrets de la manière dont vous pouvez intégrer le Memento Mori dans votre vie quotidienne, sans que cela devienne oppressant ou morbide.
a. Adopter une perspective stoïcienne.
Les stoïciens utilisaient la méditation sur la mort pour relativiser leurs préoccupations quotidiennes. Nous pouvons pratiquer ce même rituel aujourd’hui. Imaginons que nous sommes confrontés à un climat stressant au travail ou dans votre vie personnelle. En nous rappelant que tout cela est temporaire, y compris notre propre existence, nous relativiserons la situation et nous concentrerons sur ce qui est réellement important.
Nous pouvons aussi prendre chaque matin quelques secondes pour méditer sur notre propre mortalité. Cela peut être aussi simple que de prendre une profonde respiration et de penser : « Merci infiniment de m’être réveillé ce matin. Comment vais-je rendre cette journée positive et agréable ? » Ça vous parait ridicule de se lever et d’avoir cette pensée ? Savez-vous que le taux de mortalité en Belgique est globalement autour des 1 % par an ? Ce qui est très peu par rapport à d’autres pays. Avec ses 12 millions d’habitants, cela veut donc dire qu’environ 120 000 personnes vont décéder dans l’année. Ce qui fait 10 000 décès dans le mois et 333 personnes par jour et finalement 14 par heure. Donc, au final, sur une durée de 8 heures de sommeil 111 personnes seront décédées et gratitude infinie pour ne pas être de ceux-là ! Ce ne sont que des chiffres, mais je veux vous sensibiliser à cette réalité de la vie. Pendant notre sommeil 111 personnes en moyenne n’auront pas eu la chance de se réveiller avec la douceur du regard aimant de leur épouse, le chant des oiseaux dans leurs oreilles ou pire le bib strident du réveil.
b. Prioriser ce qui compte vraiment.
Le Memento Mori nous aide à redéfinir nos priorités. Si nous savions que vous n’avions qu’une année à vivre, continuerions-nous à travailler pour ce boulot alimentaire qui ne nous passionne plus véritablement ? Maintiendrions-nous les interactions avec les personnes qui nous épuisent émotionnellement ? La conscience de la mort nous pousse à dire « non » aux faits insignifiants pour faire place à ce qui est vraiment important : nos passions, nos valeurs, et nos relations authentiques.
Écrivons une liste des choses que nous exécutons chaque semaine et demandons-nous : « Si je devais mourir demain, regretterais-je d’avoir consacré autant de temps à cette activité ? ». Utilisons cette réflexion pour réajuster nos priorités et consacrer plus de temps aux activités essentielles et aux personnes qui apportent de la valeur à notre vie.
c. Cultiver la gratitude quotidienne.
Prendre conscience de la mortalité nous amène également à être plus attentifs aux petits moments du quotidien. Plutôt que de considérer chaque journée comme acquise, le Memento Mori nous encourage à voir chaque jour comme un cadeau. Cette perspective de gratitude peut significativement améliorer notre bien-être et réduire le stress.
Commençons un journal de gratitude dans lequel, chaque soir, nous notons trois choses pour lesquelles nous sommes reconnaissants. Cela peut être aussi simple qu’un bon repas, une conversation agréable ou un moment de calme dans la nature. Je vous en parle souvent de ce journal, mais c’est une routine nocturne qui a changé ma vie depuis un an que je la pratique. Au début, j’avais peine à trouver les trois moments de la journée pour laquelle j’avais de la gratitude et aujourd’hui je suis obligé de les regrouper par deux ou trois tellement il y en a et je me plais à y ajouter les détails les émotions ce qui éclaircit ma pensée et embellit ma vie.
d. Se libérer de la peur de l’échec.
L’une des plus grandes barrières au succès est souvent la peur de l’échec. Nous avons peur de prendre des risques, d’essayer de nouvelles choses ou de suivre nos rêves, car nous redoutons l’idée de l’échec. Le Memento Mori nous rappelle que la vie est trop courte pour vivre dans la peur. Si la mort est inévitable, alors pourquoi ne pas tout essayer ?
N’y a-t-il pas dans un coin de notre tête un projet ou un rêve que nous avons toujours remis à un demain qui recule sans cesse par peur de l’échec. Rappelons-nous que nous n’avons qu’une vie et que l’échec fait partie du processus d’apprentissage. Vaut-il mieux au dernier jour de notre vie que notre dernière pensée soit un soupire de regret ! J’aurais dû… Ou un soupire de joie ! Merci la vie… Engageons-nous à faire un premier pas, aussi petit soit-il, dans la direction de ce projet.
e. Améliorer ses relations.
Le Memento Mori nous rappelle également l’importance des relations humaines. Si notre temps est limité, il en va de même pour nos interactions avec ceux que nous aimons. Ce rappel nous pousse à être plus présents avec les autres et à éviter les querelles insignifiantes ou les relations toxiques.
Et si nous prenions le temps aujourd’hui d’appeler un ami ou un membre de notre famille avec qui nous n’avez pas été en contact depuis longtemps. Passons du temps avec nos proches sans distractions, en étant pleinement présents dans l’instant.
4. Comment le Memento Mori peut transformer votre perspective sur le travail ?
Dans un monde où nous sommes souvent définis par nos emplois et nos carrières, le Memento Mori offre une perspective rafraîchissante. Il nous rappelle que notre travail n’est qu’une partie de notre vie et que, bien qu’il soit important de s’engager dans des activités significatives, il ne doit pas nous définir entièrement.
Cela ne signifie pas que vous devez abandonner vos ambitions professionnelles, mais plutôt que vous devriez réfléchir à la manière dont votre travail s’aligne avec vos valeurs profondes. Êtes-vous en route pour construire quelque chose de durable ? Ou êtes-vous simplement occupé à maintenir à flot un navire qui s’enfonce irrémédiablement ? Ou plus simplement, embarqué dans une course effrénée pour obtenir une promotion ou un titre ?
Lorsqu’un général romain remportait une grande victoire et revenait à Rome pour être honoré lors d’un triomphe, un défilé grandiose avait lieu dans la ville. Le général défilait en tête de ses troupes, acclamé par la foule. Derrière lui, un esclave ou un serviteur se tenait dans son char, et son rôle était de murmurer à l’oreille du général des paroles rappelant l’humilité, souvent interprétées comme une forme de Memento Mori : « Respice post te. Hominem te esse memento », qui signifie « Regarde derrière toi. Souviens-toi que tu es un homme » ou « Souviens-toi que tu n’es qu’un mortel. »
Ce rappel avait pour but d’ancrer le général dans la réalité de sa mortalité, en dépit de l’énorme gloire qu’il recevait à ce moment-là. En d’autres termes, peu importe la grandeur des accomplissements ou la gloire des victoires, la mort attend chacun de nous, même les plus puissants. Cela incitait à la modestie et à la réflexion sur la fragilité de la vie humaine.
Prenons ce recul par rapport à notre carrière et demandons-nous : « Mon travail actuel est-il impactant positif pour moi pour les autres, utile et durable ? Si je devais quitter ce poste demain, aurais-je accompli quelque chose dont je suis vraiment fier ? » Si la réponse est non, il est peut-être temps de réévaluer vos objectifs professionnels.
5. Aller plus loin : des ressources pour approfondir le Memento Mori.
Si cet article vous a inspiré et que vous souhaitez approfondir le sujet, plusieurs livres traitent de la méditation sur la mortalité et de la philosophie stoïcienne, qui l’a popularisée.
- « Les Pensées » de Marc Aurèle : Ce classique de la philosophie stoïcienne est une collection d’observations personnelles de l’empereur romain Marc Aurèle, qui médite souvent sur la mort et l’importance de vivre selon ses valeurs. https://amzn.to/3UqfShc
- « Lettre à Lucilius » de Sénèque : Une série de lettres dans lesquelles Sénèque aborde la question de la mortalité et du bien-vivre. https://amzn.to/3Adyavn
- « The Daily Stoic » de Ryan Holiday : Ce livre moderne introduit la philosophie stoïcienne à travers des méditations quotidiennes, avec des réflexions sur la mort, le bonheur et la vertu, dommage que ce livre ne soit pas traduit en français car j’adore la posture de cet auteur dont je vous recommande l’excellant « l’obstacle est la clef . https://amzn.to/4dXr6Rv
Conclusion : Adoptons le Memento Mori pour une vie plus riche et plus consciente
Le Memento Mori n’est pas une invitation à la morosité ou au fatalisme, mais bien un rappel de la valeur inestimable de chaque moment que nous vivons. En intégrant cette idée dans votre quotidien, vous pourrez non seulement vous libérer de la peur de l’échec, mais aussi vivre de manière plus consciente et authentique. Que ce soit par des pratiques simples comme la gratitude ou des réflexions plus profondes sur vos priorités, le Memento Mori peut transformer votre rapport à la vie, au travail et à vos relations sociales. Avant de connaitre cette pratique stoïcienne, je rappelais souvent aux personnes à qui nous rendions visite lors d’un décès : La seule chose que nous savons le jour de notre naissance c’est qu’un jour nous allons mourir, mais nous faisons tout pour l’oublier ! Pourtant c’est un binôme immuable l’un ne va pas sans l’autre. Le reste c’est la vie et c’est tellement bien ainsi !
Ne laissez pas ce concept antique rester une simple idée théorique : commencez dès aujourd’hui à l’appliquer, et voyez comment il peut enrichir votre vie.
À très vite pour la suite.