
Quand tout en vous sait quoi faire… mais que rien ne bouge
Soyons honnêtes, nous savons ce que nous avons à faire. La tâche est claire. L’objectif est fixé. La deadline approche. Et pourtant… rien ne bouge.
On se dit qu’on va s’y mettre dans dix minutes, après un café, après ce scroll rapide sur Instagram, après cette vidéo « juste pour se détendre ». On repousse encore et encore jusqu’à ce que la tension monte, que la culpabilité s’invite, et que notre énergie soit entièrement mobilisée… à éviter l’action.
C’est ça, la procrastination. Ce n’est pas de la paresse. Ce n’est pas un manque d’ambition. C’est souvent bien plus subtil. C’est une forme d’auto-sabotage silencieux, une lutte intérieure entre notre envie de faire et notre difficulté à démarrer.
Et cette lutte, nous la connaissons tous.
Mais la bonne nouvelle, c’est qu’elle n’est ni une fatalité ni une identité. Il existe des techniques simples, accessibles et puissantes pour rompre l’inertie et retrouver le mouvement. Des stratégies concrètes que j’utilise personnellement et que je transmets à mes consultants pour qu’ils reprennent les rênes de leur énergie.
Dans cet article, je vous partage 3 astuces efficaces pour vous mettre en action immédiatement, sans attendre « le bon moment ». De ce que j’ai appris, le bon moment pour faire n’existe pas, il se crée.
Prêt à passer à l’action ? Alors, commençons.
I. Comprendre ce qui vous retient, sans vous juger.
Avant de chercher à vous forcer à agir, prenez un instant pour regarder ce qui vous freine. Car non, si vous procrastinez, ce n’est pas parce que vous êtes paresseux, incapable ou « nul ». Ce sont là des jugements trop faciles, souvent destructeurs, qui ne font qu’ajouter de la culpabilité à l’inertie.
En réalité, procrastiner est une stratégie d’adaptation émotionnelle. Ce que nous repoussons n’est pas la tâche en elle-même, mais l’émotion désagréable qu’elle réveille en nous : la peur de l’échec, le doute, la surcharge, l’ennui ou même l’impression d’être submergé par l’ampleur du travail.
Le professeur Timothy Pychyl, le spécialiste mondial de la procrastination à l’université Carleton (Canada), parle de la procrastination comme d’un problème d’autorégulation émotionnelle, et non de gestion du temps.
Quand nous sommes confrontés à une tâche qui provoque une émotion négative (inconfort, stress, pression…), notre cerveau, plus précisément le système limbique (lié aux émotions et à la récompense immédiate), prend le dessus sur le cortex préfrontal, qui est normalement chargé de la planification, du raisonnement et de la prise de décision à long terme.
Résultat ? Nous choisissons le soulagement immédiat plutôt que la satisfaction différée. Nous évitons la tâche… et nous nous réfugions dans des activités plus gratifiantes à court terme (scrolling, nourriture, distractions). Mais ce soulagement est de courte durée : la tâche reste là, tapie dans un coin de notre esprit, plus lourde encore.
Le Dr Piers Steel, auteur du livre The Procrastination Equation, résume bien ce fonctionnement :
« La procrastination est une forme d’auto-traîtrise. Nous savons ce que nous devrions faire, et pourtant, nous ne le faisons pas ; pour des raisons émotionnelles, pas rationnelles. »
Chez beaucoup d’entre nous, procrastiner est lié à une forme de perfectionnisme inconscient. Nous voulons que tout soit parfait, du premier coup. Nous avons peur de mal faire, de décevoir, de ne pas être à la hauteur. Alors nous reportons. Car tant que nous n’avons pas commencé, nous n’avons pas échoué.
Mais cette logique est piégeuse. En voulant éviter l’imperfection, nous fuyons l’apprentissage. Or, c’est dans l’action, dans l’essai, dans l’imperfection même que nous nous donnons toutes les chances de progresser.
Et si nous changions de regard ?
Et si au lieu de nous blâmer, nous accueillions cette part de nous qui a peur ou doute ?
Et si, au lieu de chercher à nous « forcer », nous apprenions à comprendre, à apprivoiser et à traverser nos émotions ?
Car la clef pour sortir de la procrastination, c’est d’abord de reconnaître ce qui se passe en nous, sans se flageller.
Le stoïcien Épictète disait :
« Ce ne sont pas les choses qui nous troublent, mais l’idée que nous nous en faisons. »
C’est exactement cela : notre procrastination est souvent le reflet d’une perception exagérée de la difficulté, d’un imaginaire amplifié autour de la tâche.
Dans les sections suivantes, nous verrons comment passer à l’action malgré ces émotions, comment réengager le cortex préfrontal, et comment reprendre, pas à pas, le pouvoir sur notre énergie.
II. Astuce 1 : La règle des 2 minutes : amorcez l’action sans effort.
Quand nous repoussons une tâche, ce n’est pas tant le faire qui nous fatigue. C’est l’idée de devoir s’y mettre. C’est comme si, face à une montagne, nous n’avions même plus la force de chausser nos bottines.
Et si, au lieu de penser à grimper la montagne, on commençait simplement… par faire un premier pas ?
C’est exactement le principe de la règle des 2 minutes.
Popularisée par David Allen, auteur du best-seller « la méthode GTD » cette règle repose sur une vérité simple : Si une tâche prend moins de 2 minutes, faisons-la tout de suite.
Pourquoi ? Parce que le temps que nous passons à la noter, la planifier ou la repousser est souvent supérieur au temps qu’elle demande réellement. C’est donc un moyen ultra-efficace de désencombrer notre esprit et de retrouver un sentiment immédiat d’efficacité.
Mais ce n’est pas tout. Cette règle peut aussi être exploitée avec puissance pour affronter des tâches plus longues.
Voici donc une variante anti-procrastination : le « Juste 2 minutes »
Prenons une tâche que nous repoussons depuis des jours : écrire un email, commencer un rapport, couper une haie trop longue, faire du sport, ranger un tiroir. Vous n’avez pas envie, vous vous sentez bloqué ?
Disons-nous simplement :
« Je ne suis pas obligé de tout faire. Je vais juste m’y mettre… pendant 2 minutes. »
Deux minutes pour ouvrir le document. Écrire une phrase. Lacer ses chaussures. Sortir les dossiers.
C’est tout.
Et devinez quoi ? Dans la majorité des cas, une fois lancés, nous continuons naturellement. Car l’inertie est rompue. L’effort perçu diminue. Et notre cerveau, qui redoutait un Everest, découvre une simple colline.
Le simple fait d’amorcer une tâche active le striatum, une zone du cerveau impliquée dans le circuit de la récompense. Ce déclenchement produit une sensation de satisfaction légère, ce qui encourage la poursuite de l’action.
C’est aussi lié à l’effet Zeigarnik, mis en évidence par la psychologue Bluma Zeigarnik qui dit que : une tâche commencée, même brièvement, reste active dans le cerveau, ce qui nous pousse inconsciemment à vouloir la terminer.
Commencer, même un peu, crée une tension cognitive saine, une sorte de moteur intérieur qui nous pousse à poursuivre ce que nous avons amorcé.
Cette règle semble banale, mais elle est redoutablement efficace si on l’applique en pleine conscience.
Elle nous permet de reprendre la main, sans attendre la motivation.
Elle incarne un principe stoïcien fondamental : « Fais ce que tu peux, avec ce que tu as, là où tu es. »
Alors la prochaine fois que nous ressentons l’inertie, le doute, l’envie de fuir…
Faisons-le, juste deux minutes. Ce premier pas suffit souvent à créer le mouvement. Et le mouvement crée l’élan.
III. Astuce 2 — Le « temps bloqué » : prenons rendez-vous avec notre action.
Nous avons tous de bonnes intentions : « Je le ferai cet après-midi », « Je m’en occuperai demain », « Je vais m’y mettre bientôt ».
Mais vous le savez comme moi : sans cadre précis, ces intentions s’évaporent dans la journée, absorbées par les imprévus, les distractions ou simplement… le manque d’énergie.
Pour lutter contre la procrastination, nous devons arrêter de dépendre de notre motivation fluctuante, et organiser notre action dans le temps, comme un rendez-vous avec nous-mêmes.
Le « temps bloqué » (ou time blocking) consiste à réserver un créneau précis dans son agenda pour se consacrer à une tâche spécifique, sans y toucher, ni y réfléchir, en dehors de ce moment.
Autrement dit : ce n’est plus « je le ferai quand j’ai le temps », mais « je le fais jeudi de 16 h à 17 h 30 ». Point final.
Cette méthode crée une intentionnalité forte. Elle transforme une tâche floue et abstraite… en un engagement clair, concret et visible.
Selon le Dr Roy Baumeister, spécialiste de la volonté et de l’autorégulation, notre énergie décisionnelle est limitée chaque jour (c’est le concept d’épuisement de l’ego). Plus nous devons choisir, arbitrer ou repousser des décisions, plus nous épuisons cette réserve… et plus nous procrastinons.
Le temps bloqué supprime l’effort décisionnel : la décision est déjà prise à l’avance. Le cerveau, soulagé, peut se consacrer pleinement à l’exécution sans avoir à « choisir ».
De plus, planifier une tâche avec précision active le cortex préfrontal, impliqué dans l’organisation, la gestion du temps et la visualisation du futur. Or, c’est précisément cette zone qui est inhibée quand nous procrastinons. La stimuler, c’est reprendre le contrôle.
Quand nous bloquons un temps pour une tâche, nous créons une bulle d’attention. Nous limitons les interruptions, nous restaurons notre capacité à nous concentrer… et nous avançons.
L’auteur Cal Newport, dans son livre Deep Work, explique que notre productivité et notre satisfaction sont directement liées à notre capacité à travailler en profondeur, sans distraction, sur des blocs de temps dédiés.
Mais comment mettre en place le temps bloqué concrètement ?
Choisissons notre tâche prioritaire (celle que nous repoussons, mais qui compte vraiment).
Estimons un créneau réaliste (25, 50, 75 min, vous savez mon amour pour le Pomodoro… inutile de viser 3 h tout de suite).
Notons-le dans notre agenda comme un vrai rendez-vous (et respectons-le comme tel).
Préparons notre environnement : notifications coupées, téléphone éloigné, documents ouverts à l’avance.
À l’heure dite, commençons sans négocier. Même 5 minutes. Même mal. Mais commençons.
Vous verrez qu’avec cette discipline douce, vous récupèrerez une sensation puissante : celle de redevenir maître de votre temps.
Quand nous bloquons un créneau pour une action importante, nous ne faisons pas qu’organiser notre agenda.
Nous envoyons un message à notre cerveau, et surtout à nous-mêmes :
« Ce que j’ai à faire est important. Et je mérite le respect de mon propre engagement. »
C’est une forme d’assertivité intérieure. Un acte de souveraineté personnelle. Une réponse digne à la fuite et à la dispersion.
IV. Astuce 3 — La visualisation active de l’après : reconnectez-vous à la satisfaction.
Lorsqu’on procrastine, nous sommes souvent focalisés sur l’inconfort du moment présent : la tâche semble pénible, floue, exigeante, ou simplement… ennuyeuse.
Et dans ce brouillard, nous oublions le pourquoi, le bénéfice, le soulagement qui vient après.
C’est ici que la visualisation active de l’après intervient. Elle nous aide à déplacer notre attention de la douleur anticipée… vers la récompense ressentie.
Cette technique consiste à nous projeter quelques minutes dans le futur, après avoir réalisé la tâche que nous repoussons.
Prenons un instant pour fermer les yeux et imaginer très précisément :
le soulagement de l’avoir fait, la satisfaction de nous être respecté(e)s, le plaisir d’avoir avancé, même un peu, la liberté mentale retrouvée. Et ressentons cela, comme si c’était déjà accompli.
Cette projection positive devient une boussole émotionnelle, un levier pour l’action immédiate.
Notre cerveau ne fait pas toujours la différence entre une expérience vécue et une expérience visualisée de manière vivide. La visualisation mentale active les mêmes circuits neuronaux que l’action réelle (aire motrice, cortex préfrontal, amygdale).
La chercheuse Tali Sharot, spécialiste des neurosciences de la motivation, a démontré que l’anticipation d’une récompense augmente la production de dopamine, un neurotransmetteur clé de l’activation.
Se projeter dans un futur positif donne au cerveau une raison d’agir maintenant, en activant le circuit de la motivation.
C’est aussi un bon moyen de court-circuiter le biais de court terme, cette tendance naturelle à privilégier une récompense immédiate (comme scroller sur Instagram) plutôt qu’un bénéfice différé (comme finir un dossier).
Voici pour terminer un petit rituel que vous pouvez mettre en place quand vous réalisez que vous procrastinez :
Choisissons une tâche que nous repoussons.
Fermons les yeux. Prenons 3 grandes respirations.
Projetons-nous dans 30 minutes, ou à la fin de la journée. Imaginons-nous que nous l’avons faite.
Ressentons : notre corps plus léger, notre esprit libéré, la fierté, la tranquillité retrouvée.
Amplifions cette sensation. Faisons-la vibrer. Savourons-la.
Réouvrons les yeux et commençons immédiatement cette tâche.
Nous savons maintenant ce qui nous attend une fois qu’elle sera accomplie.
Cette approche rejoint un principe stoïcien appelé « préméditation boni », une variante positive de la « préparation mentale ».
Là où les stoïciens anticipaient les obstacles pour s’y préparer (premeditatio malorum), nous anticipons ici les bénéfices de l’action juste pour y tendre plus facilement.
Voilà pour la procrastination. J’espère que cet article vous aidera à reprendre le pouvoir et à agir même dans les situations ou votre mental freine de toutes ces forces. Soyez indulgent avec vous-même et appliquez l’une des trois astuces que je vous donne. Ma préférée est la règle des deux minutes car elle est redoutable d’efficacité. Mais ce qui marche pour moi ne fonctionnera peut-être pas pour vous. Donc faites vos expériences et surtout partagez-les avec nous dans les commentaires ou en privé !
À très vite pour la suite.
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