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Le stoïcisme et l’épicurisme, c’est quoi la différence ?

Parmi les grandes sagesses de l’Antiquité, deux écoles traversent les siècles avec une étonnante modernité : le stoïcisme et l’épicurisme. On les cite souvent, parfois à tort, parfois à raison. On les confond aussi. Il n’est pas rare d’entendre qu’un épicurien est simplement « un jouisseur » ou qu’un stoïcien est « quelqu’un d’insensible ». Des raccourcis bien éloignés de la richesse de ces deux visions du monde.

Et pourtant, derrière ces philosophies se cachent deux chemins vers une même quête : vivre mieux, avec moins de trouble intérieur, et plus de cohérence. Deux façons de répondre à une même question : comment vivre une vie bonne ? L’une en cherchant à cultiver la vertu et à s’affranchir de ce qui ne dépend pas de nous. L’autre en apprenant à savourer les plaisirs simples, en évitant la douleur et l’agitation.

Pourquoi ces courants nous parlent-ils encore aujourd’hui ? Parce qu’ils nous offrent des repères pour penser notre rapport au bonheur, à la souffrance, à la mort, au désir, à la société. Et surtout parce qu’ils nous invitent à reprendre la responsabilité sur notre manière de vivre.

Dans cet article, nous allons explorer ensemble les grandes différences entre stoïcisme et épicurisme, avec des mots simples, des exemples concrets, et des citations puissantes. Et en fin de lecture, vous pourrez vous poser cette question : sommes-nous plutôt stoïcien, épicurien, ou un peu des deux ?

I.                    Deux quêtes d’une vie bonne, mais deux chemins opposés.

 

Le stoïcisme et l’épicurisme partagent un même point de départ : la volonté de vivre une vie bonne, apaisée, libre du trouble intérieur. Mais très vite, ils divergent sur la manière d’y parvenir. Le stoïcien et l’épicurien poursuivent un objectif similaire l’eudaimonia, ou plus simplement le bonheur profond et durable, mais ils ne prennent pas le même sentier pour l’atteindre.

Pour les stoïciens, la vie bonne repose sur un principe fondamental : vivre en accord avec la nature, c’est-à-dire avec la raison, la réalité, et notre condition humaine. Le bonheur ne dépend pas de circonstances extérieures qui sont instables et hors de notre contrôle, mais de notre attitude intérieure.

Ce qui fait la grandeur de l’homme, ce n’est pas ce qu’il possède ou subit, mais ce qu’il décide de faire avec ce qu’il vit.

La vertu (courage, sagesse, tempérance, justice) est la seule chose véritablement bonne. Tout le reste, richesse, santé, plaisir, réputation sont secondaires. C’est ce qu’ils appellent des « indifférents ». Le stoïcien n’est pas insensible, mais il refuse d’être esclave de ses émotions. Il cherche à être souverain dans son esprit, libre face à ce qu’il ne contrôle pas.

 

Marc Aurèle, empereur stoïcien, résume cette posture en une phrase :

«Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé, le courage de changer ce qui peut l’être, et la sagesse de distinguer l’un de l’autre.»

 

À l’opposé apparent, l’épicurien revendique une autre forme de sagesse : rechercher le plaisir, mais pas n’importe lequel. Ce plaisir n’est ni excessif ni immédiat. Il ne s’agit pas de vivre dans l’excès, mais de cultiver un plaisir stable, durable et serein — ce qu’Épicure appelle l’ataraxie, l’absence de trouble de l’âme.

Épicure distingue les désirs naturels et nécessaires (comme manger, avoir des relations humaines simples, dormir), des désirs artificiels ou illimités (comme la gloire, le luxe, le pouvoir). Le sage est celui qui sait renoncer à ce qui le rend dépendant et agité, pour se consacrer à ce qui nourrit réellement son bien-être intérieur.

Pour lui, le bonheur réside dans la simplicité, la liberté, l’amitié et la réflexion lucide sur les limites de la vie.

Il ne s’agit donc pas d’une vie de plaisirs effrénés, mais d’une vie réfléchie, mesurée, et paisible. Une vie où l’on apprend à suffire à peu pour goûter beaucoup.

 

Nous pourrions dire que :

Le stoïcien cherche à être invulnérable, imperméable au monde, fort intérieurement.

L’épicurien, lui, cherche à vivre léger, à éviter les douleurs inutiles, à rester paisible dans un monde parfois agité.

Donc deux visions, deux chemins, mais un but commun : vivre en paix avec soi-même.

II.                  Trois grandes différences fondamentales.

 

Bien que le stoïcisme et l’épicurisme visent tous deux la paix intérieure, ils proposent des stratégies radicalement différentes pour y parvenir. Voici trois grands axes où leurs visions s’opposent de manière nette : le rapport aux désirs, au plaisir et à la douleur, et aux événements extérieurs.

  1. Leur rapport aux désirs : les dompter ou les filtrer ?

Pour les stoïciens, les désirs sont souvent des sources de trouble. Ils naissent de notre attachement à ce qui ne dépend pas de nous : reconnaissance, richesse, confort, possession. Le sage stoïcien ne cherche pas à satisfaire ses désirs, mais à s’en libérer. Il cultive l’autonomie intérieure en s’exerçant à ne désirer que ce qu’il peut maîtriser — c’est-à-dire ses propres pensées, décisions et jugements.

 

Sénèque écrit : «Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles.»

 

Épicure lui ne rejette pas les désirs, mais propose de les trier avec discernement. Il distingue trois types :

  • Désirs naturels et nécessaires (boire, manger, dormir, se sentir en sécurité)
  • Désirs naturels, mais non nécessaires (raffinements, plaisirs sensoriels)
  • Désirs non naturels et non nécessaires (pouvoir, gloire, luxe)

 

Le bonheur vient de la satisfaction modérée des désirs simples, et de l’évitement de ceux qui provoquent souffrance, agitation ou dépendance.

Épicure écrit : «Celui qui ne se contente pas de peu ne sera jamais satisfait.»

 

  1. Le plaisir et la douleur : indifférence ou boussole ?

Le stoïcien ne rejette pas le plaisir, mais il ne le considère ni comme un but ni comme un mal. C’est un indifférent : un événement extérieur qui ne doit pas guider nos décisions. Manger un bon repas ? Agréable, mais sans importance. Le sage stoïcien apprend à ne pas dépendre de la présence ou de l’absence de plaisir. De même, la douleur n’est pas un mal en soi, mais une occasion de cultiver la vertu : le courage, la résilience, la dignité.

Marc Aurèle écrit : «Ce qui t’arrive ne trouble pas ton esprit, c’est ton jugement qui te trouble.»

 

Pour Épicure, le plaisir est le critère du bien. Mais il ne s’agit pas d’un plaisir intense et passager. Il parle d’un plaisir stable, d’une absence de douleur dans le corps (aponie) et d’absence de trouble dans l’âme (ataraxie). La douleur, elle, est un mal, mais elle peut être supportable si elle est brève, et supportée si elle conduit à un plus grand bien.

Épicure écrit : «Tous les plaisirs ne sont pas à choisir, pas plus que toutes les douleurs à fuir.»

 

  1. Leur vision du monde extérieur : l’accepter ou s’en éloigner ?

 

Le stoïcien fait face au monde. Il accepte ce qu’il ne peut changer et s’efforce d’agir avec sagesse là où il a du pouvoir. Ce qui compte, ce n’est pas ce qui arrive, mais la manière dont nous y réagissons. L’acceptation active des événements extérieurs devient un exercice de liberté intérieure.

Épictète écrit : «Ce qui dépend de toi, c’est ta volonté. Tout le reste, apprenons à l’accueillir.»

L’épicurien, quant à lui, préfère s’éloigner du tumulte du monde. Il recommande de vivre retiré, dans un cercle d’amis, à l’écart des passions politiques, de la compétition sociale, des conflits inutiles. Son bonheur se construit dans un espace de tranquillité, un peu à l’abri du tumulte collectif. Il conseille : «Vis dans l’ombre.»

 

Ces différences ne sont pas que théoriques : elles touchent notre manière de vivre, de choisir, de réagir. Elles tracent des routes distinctes, mais qui peuvent aussi se croiser dans une approche personnelle, consciente et responsable.

 

III.                Exemples concrets dans nos vies modernes

 

Comprendre les différences entre le stoïcisme et l’épicurisme, c’est bien. Mais les vivre, les incarner dans notre quotidien, c’est encore mieux. Pour rendre ces deux visions plus concrètes, imaginons comment un stoïcien et un épicurien réagiraient face à trois situations courantes de notre époque.

  • L’échec professionnel.

Face à un échec, perte d’un emploi, projet avorté, promotion refusée, le stoïcien se rappelle immédiatement ce principe : « Ce qui ne dépend pas de moi ne peut me nuire. »

Il ne nie pas la déception, mais il refuse d’en être prisonnier. Il se concentre sur ce qu’il peut apprendre, sur sa manière d’y réagir, et sur l’opportunité de cultiver sa vertu : patience, persévérance, résilience. Il se dit : «Ce n’est pas l’échec qui me définit, c’est ma manière de me relever.»

 

L’épicurien, lui, se demande si cet emploi ou ce projet contribuait réellement à son plaisir durable. Il relativise : ce n’est pas un drame, mais peut-être une occasion de se recentrer sur ce qui le rend heureux au fond : ses relations, sa tranquillité, sa liberté. Il évite de se tourmenter pour ce qui n’apportait que du stress ou de la vanité.

 

  • Le conflit relationnel.

Dans une dispute ou un désaccord, le stoïcien cherche à ne pas se laisser emporter par ses émotions. Il pratique le recul intérieur : il questionne son ego, son jugement, ses attentes. Il se demande : «Est-ce que cette colère est justifiée? Est-ce qu’elle m’est utile?» Il répond avec calme mais fermeté, sans blesser. Il reste maître de lui-même, et non esclave de l’offense.

L’épicurien, quant à lui, se demandera si cette relation vaut le trouble qu’elle engendre. Si elle nuit à sa paix intérieure, il s’en éloigne. Il privilégie les relations simples, douces, sincères. Il choisira peut-être de ne pas répondre, de ne pas insister, et de préserver sa sérénité.

 

  • L’envie de tout quitter et changer de vie.

Le stoïcien se demande d’abord : «Est-ce que je fuis quelque chose, ou je cherche à agir selon ma nature?» Il ne prend pas de décision sur un coup de tête. Il s’interroge sur ses motivations profondes, et agit en cohérence avec ses valeurs, sa raison, sa mission de vie. Il ne cherche pas le confort, mais l’alignement.

 

L’épicurien, lui, se demande : «Ce que je vis me procure-t-il du plaisir durable, ou de l’agitation?»  Si la vie actuelle est trop contraignante, source de stress chronique, il cherchera une existence plus simple, plus libre, plus agréable. Pour lui, il est légitime de quitter ce qui trouble l’âme pour cultiver la joie calme.

 

Et nous, dans tout ça ?

Parfois, nous sommes stoïciens sans le savoir, lorsque nous tenons bon face à l’adversité.

D’autres fois, nous sommes épicuriens quand nous choisissons la paix plutôt que le combat.

Et souvent, nous jonglons entre les deux : résister à l’agitation extérieure, tout en cultivant les plaisirs simples.

Ces exemples nous montrent que ces philosophies ne sont pas figées. Elles peuvent être des ressources complémentaires, selon les moments de notre vie, nos tempéraments et nos choix.

Jusqu’à l’écriture de cet article, j’étais persuadé d’être stoïcien pur et dur ! mais dans la réalité je suis plutôt un mélange des deux.

Un épicurien, mais c’est ma princesse qui m’a appris cela, dans l’appréciation des plaisirs simples et la recherche d’une vie paisible, mais avec une bonne dose de stoïcisme pour garder la maîtrise de mes émotions face aux épreuves que la vie dresse devant moi.

Finalement J’aime cette idée de cultiver la sérénité intérieure (stoïcienne) tout en savourant pleinement les petits bonheurs de la vie (épicuriens). Ce qui compte, c’est cette capacité à choisir sa réaction et à avancer avec lucidité, responsabilité, et joie.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Plutôt épicurien ou stoïcien ? Je me demande si je ne vais pas proposer un petit test à mes abonnés pour qu’ils puissent se situer. Quoi ? Pas encore abonné ? Si ce petit test vous intéresse, rejoignez vite la communauté grandissante de nosetadam, de ceux qui veulent reprendre de façon durable la responsabilité de leur vie.

 

À très vite pour la suite

NB : cet article vous a passionné, je vous conseille : Jésus Était-il Stoïcien ? Comparaison entre Stoïcisme et Christianisme. – Nos états d’Am’s

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